Ruslan Trad
«Le commerce des armes est plus facile ici que dans d’autres parties du monde. Nous pouvons compter sur des frontières problématiques et la corruption — vous ne saurez vous imaginer de combien de portes peuvent s’ouvrir avec quelques milliers d’euros.» L’homme qui l’a déclaré* fait référence au commerce des armes dans les Balkans et en Europe du Sud. Son passé est la preuve de ce qu’il dit, une longue carrière de criminalité non détectée. La raison pour laquelle ces réseaux criminels ne sont pas sous la loupe est que, pour les autorités locales, la question du trafic d’armes vers l’Europe est une question plus particulière et plus difficile.
Ces dernières années, beaucoup de choses ont été dites et écrites sur la contrebande d’armes de l’Europe vers le Moyen-Orient et l’Afrique. L’essor et l’activité de l’État islamique ont provoqué une explosion de rapports, d’articles et d’enquêtes sur la manière dont les armes tombent entre les mains de l’un ou l’autre groupe. Les armes croates, bulgares, russes et occidentales se trouvaient sur les marchés noirs du Moyen-Orient, car les armes officiellement vendues par différents pays tombent facilement dans le secteur gris à cause de la corruption ou des offensives militaires avec une mauvaise fin. Cependant, que dire du trafic d’armes vers l’Europe?
Le nombre d’articles et de recherches sur cette question est nettement inférieur. Les contacts avec de nombreuses sources à ce sujet montrent que les réseaux criminels en Europe sont en constante évolution. Ces groupes concluent des alliances et forment des syndicats avec des groupes criminels en dehors de l’Union européenne (UE) et parfois, par l’intermédiaire de médiateurs, communiquent avec des organisations terroristes au Sahel, en Asie centrale et en Afrique occidentale. La mondialisation dans la version moderne d’aujourd’hui n’est pas différente de la version médiévale ou antique. Aujourd’hui comme hier, des groupes internationaux agissent ensemble au nom du profit. Les communications d’aujourd’hui et les nouveaux outils d’échange d’information rendent la création de tels syndicats beaucoup plus rentable et plus difficile à arrêter. Il existe aujourd’hui ce que l’on pourrait appeler une « criminalité internationale», qui désigne des groupes de différentes parties du monde qui créent des liens les uns avec les autres pour contourner les divers obstacles, notamment les lois, pouvant entraver leurs affaires.
Ces alliances criminelles internationales sont agressives dans la défense de leurs intérêts, tentent de conquérir des territoires, de contrôler des villes et d’imposer des taxes lorsqu’elles le jugent nécessaire. Cela est particulièrement visible en Amérique du Sud et au Moyen-Orient, mais des exemples similaires existent même en Europe du Sud et de l’Est, où les structures mafieuses imposent leurs politiques, forçant les autorités locales à une relation de collaboration et de corruption. Ces alliances criminelles, à leur tour, constituent l’une des sources de revenus des groupes terroristes et des nœuds clés de leur infrastructure logistique pour le transport des agents et de l’argent. «Je me fiche que quelqu’un soit arabe, kurde ou flamand. Nous avons travaillé avec tous les groupes», déclare un ancien membre bulgare de la structure mafieuse. «La seule chose qui compte, c’est de respecter les règles. Des personnes suspectes ont probablement croisé nos chemins, mais ce n’est pas notre problème.»
Depuis les années 1990, les institutions européennes publient périodiquement des rapports sur les contacts possibles entre les groupes terroristes et les groupes mafieux européens. En 2004, lorsque l’attentat à la bombe de Madrid a eu lieu, il était clair que c’était précisément grâce à une alliance de ce type, entre la mafia et les cellules terroristes, près de 50 000 euros ayant été versés aux organisateurs de l’attentat. Encore une fois, grâce à ces alliances, le crime organisé contribue à la recherche d’armes, à la logistique et aux possibilités de voyage. De cette manière, les groupes terroristes comptent sur les structures criminelles locales en Europe pour opérer librement sur le continent. Ces criminels ont également fourni de faux documents, des armes et de la logistique aux cellules de l’État islamique responsables des attentats perpétrés à Paris et à Bruxelles, respectivement en 2015 et 2016.
Le mélange des structures terroristes et mafieuses en Europe remonte au moins aux années 1990. Ces structures comprennent des extrémistes de gauche, comme le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), qui a rassemblé des ressources par l’intermédiaire de réseaux criminels en Europe pour sa guerre contre la Turquie, et des groupes d’extrême droite comme les milices orthodoxes en Bosnie, qui ont tous bénéficié de l’accès au marché noir. Dans bien des cas, la communication entre le crime organisé et les groupes terroristes est stricte et dispose de ses propres règles. Après le 11 septembre, ces règles sont beaucoup plus respectées afin d’éviter d’être détectées par les ministères publics. L’un des aspects les plus importants de cette coopération est la création de canaux de trafic, qui constituent un poste budgétaire majeur pour tous ces groupes, et la protection des canaux.la protection des canaux fait donc l’objet d’une attention particulière.
Par exemple, Al-Qaïda a été sérieusement impliquée dans la sécurisation des circuits des cartels colombiens qui transfèrent la cocaïne d’Amérique du Sud vers les Balkans et l’Europe en passant par l’Afrique occidentale. Des rapports européens montrent qu’Al-Qaïda est impliquée dans le trafic de drogue, d’armes et de pierres précieuses, avec des contacts dans des groupes mafieux balkaniques et italiens. Les travailleurs opérationnels du groupe terroriste sont remarqués de l’Albanie et de la Bosnie jusqu’aux Pays-Bas, en passant par la Suisse et l’Allemagne. Al-Shabab, la branche somalienne d’Al-Qaïda, entretient un vaste réseau en Scandinavie, où se trouve une importante diaspora somalienne, et Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) a des contacts en Espagne en raison de sa proximité avec les territoires où le groupe opère. De la mafia italienne aux groupes anarchistes et communistes extrémistes grecs en passant par le PKK, des groupes du monde entier ont des allégeances et des alliances supranationales qui offrent des canaux de trafic et des possibilités de financement. Il s’agit le plus souvent du trafic de drogues et d’armes, qu’elles soient destinées à des assassinats sur contrat ou à des actes terroristes.
Le fait que l’appartenance politique ou ethnique n’a pas d’importance dans ce domaine signifie qu’il en résulte d’étranges compagnons de lit. Dans les années 1980, cela signifiait l’existence de liens sérieux entre la Camorra, un syndicat du crime sicilien à caractère secret, et les terroristes communistes des Brigades rouges italiennes, alors que, dans le même temps, la mafia sicilienne travaillait avec des groupes fascistes. Les séparatistes de gauche de l’Armée républicaine irlandaise (IRA) entretenaient des liens avec Ndrangheta, un groupe du crime organisé du sud de l’Italie, qui était également garante du trafic d’armes pour le Liban, un État dominé par les djihadistes chiites de la milice du Hezbollah en Iran. La Camorra a fourni des munitions à l’ETA, les séparatistes basques du nord de l’Espagne, et en 2002, les autorités italiennes ont découvert des liens entre des groupes terroristes nord-africains et des organisations criminelles italiennes qui faisaient le trafic de drogues. Il existe également des preuves de liens avec des groupes balkaniques.
«Les politiciens profitent de nos affaires. Nous avons donné des cadeaux à de nombreuses reprises», a déclaré un autre ancien membre de la mafia en Serbie. Son groupe a opéré en Bulgarie, en Macédoine, en Albanie et en Italie. Lui-même évite souvent l’arrestation en raison de problèmes administratifs. En fait, c’est l’administration qui est l’un des problèmes qui entravent les enquêtes. Des erreurs dans les documents, voire un manque d’échange d’informations entre pays européens, permettent à ces groupes de développer leurs activités sans inquiétude.
Dans ce contexte, il convient d’identifier deux types d’alliances qui ont un impact direct sur l’UE. Le premier type d’alliances est celui des alliances créées à l’intérieur des frontières européennes. Il a un impact sur la sécurité des États membres, y compris les complots d’actes terroristes. Le deuxième type d’alliances est créé en dehors de l’UE ou à la périphérie — les Balkans, la Grèce, la Sicile, l’Espagne — et représente également une menace pour la stabilité de l’UE. Et si nous parlons davantage de l’Europe occidentale, il est bon de prêter attention à une région qui a un rôle très important à jouer dans la sécurité, mais c’est par intérêt médiatique: les Balkans.
Selon les rapports de FRONTEX et d’Europol, les pays de l’ex-Yougoslavie et la Bulgarie constiuent la principale artère par laquelle une grande quantité de drogues et d’armes passe en Scandinavie. La frontière gréco-turque et la frontière serbe avec la Roumanie sont parmi les points les plus sensibles. Sur ces routes, établies par des groupes criminels locaux, passent aussi des islamistes du Moyen-Orient. Le principal problème est qu’une fois entrés dans l’espace Schengen — qui a démantelé les frontières entre les États membres de l’UE — ces personnes peuvent atteindre n’importe quelle région d’Europe sans même avoir à se soucier de présenter un faux passeport. Afin de contourner les obstacles, les groupes terroristes établissent des contacts avec des groupes criminels en Europe du Sud-Est. Ces routes n’ont aucun lien avec les flux migratoires ou le trafic de réfugiés — les groupes criminels utilisent leurs propres méthodes, y compris la corruption des agents frontaliers.
Ces alliances portent leurs fruits. Les rapports européens font état d’un problème croissant et de liens de plus en plus étroits avec les structures criminelles des diasporas de troisième génération des Balkans, en particulier en Scandinavie. En 2013, la police bulgare a mis au jour un canal pour le trafic d’armes de la Bulgarie vers la Suède et l’Allemagne. Les armes automatiques et les munitions de Kalachnikov avaient quitté la province de Stara Zagora, dans le centre de la Bulgarie, en passant par le poste-frontière de Kalotina, à la frontière occidentale avec la Serbie. Les criminels n’avaient pas eu peur d’utiliser un bus de passagers. Bien qu’il n’y ait aucune preuve que ces armes étaient destinées à des groupes terroristes, l’opération de police a démontré l’étendue du réseau de trafic d’armes qui, comme cela a été démontré à Paris et à Bruxelles en 2015-2016, et à Madrid il y a quinze ans, est facilement exploité par des terroristes.
Une autre preuve de l’ampleur du problème a été fournie en 2017 par l’action de la police en Espagne qui a brisé un canal de trafic d’armes vers onze pays européens. 664 armes ont été saisies; plus de 240 personnes ont été arrêtées. Certains des détenus étaient des citoyens roumains et bulgares, qui avaient acheté des imitations d’armes et les avaient transformées en armes à feu dans des usines situées en Espagne. Une fois prêtes, les armes ont été placées en Europe sur le marché noir. Plus de 34 000 balles, grenades et silencieux ont été saisis pendant la campagne.
Un autre exemple vient de Malmö, une ville du nord de la Suède qui est plus touchée par la criminalité violente que toute autre région de Suède, selon une enquête réalisée en juin par le Conseil national suédois pour la prévention du crime. L’une des principales raisons en est l’importation d’un nombre croissant de groupes criminels balkaniques. La police suédoise affirme que ces dernières années, les explosifs utilisés dans la ville sont devenus plus puissants. De 2015 à 2017, les explosions ont été principalement causées par des grenades à main héritées de la guerre civile en ex-Yougoslavie. En 2018, les explosions ont été principalement causées par des pétards Cobra 8 fabriqués par la société italienne Di Blasio. L’une des attaques les plus sanglantes a été perpétrée par des groupes balkaniques dont les membres ont utilisé des AK-47 importés clandestinement d’Europe du Sud-est. Pour la police de Malmö, les liens entre les groupes criminels sont clairs et ces armes sont toutes illégales en Suède, mais elles peuvent encore être achetées facilement en ligne et introduites clandestinement par l’intermédiaire de ces réseaux basés parmi les nouveaux venus.
Le problème du trafic d’armes était devenu une telle préoccupation qu’en avril 2018, une réunion entre les représentants des services de police européens a été organisée dans la capitale bulgare, Sofia, afin de discuter des options pour décourager le trafic des armes légères et des munitions vers l’Europe.
La montée de l’Etat islamique a quelque peu focalisé les responsables européens sur le lien entre le crime organisé et le terrorisme. L’État islamique a pris des mesures importantes pour diversifier ses ressources financières. Outre un modeste commerce de pétrole en collaboration avec le gouvernement syrien, L’État islamique a accru son rôle dans la vente de drogues et d’armes. Les djihadistes ont mis en place un réseau par le biais d’un canal de communication. Les djihadistes ont établi un réseau par des canaux allant de l’Afrique avec leurs unités en Libye et au Nigeria, à l’Asie avec leur division afghane via leurs unités au Yémen. Ces réseaux de l’État islamique sur la masse continentale eurasienne ont établi des liens avec le système international plus large de distribution de drogues, avec leurs agents opérant aussi loin que l’hémisphère occidental, à Trinité-et-Tobago, au Mexique, et avec les cartels en Colombie, pour faire traverser l’Atlantique jusqu’au Sahara occidental aux produits pharmaceutiques. Outre les trafics de cocaïne et d’héroïne, l’État islamique continue de participer activement à l’exportation d’antiquités de tous les pays où il est présent, qu’il soit reconnu ou non — Afghanistan, Syrie, Irak, Liban, Égypte, Somalie, Yémen, Libye, Nigeria, Philippines, Inde.
Nous devons ajouter une nouvelle tendance à cette liste d’activités illicites. Depuis 2017, l’État islamique a exporté depuis l’Irak et la Syrie des actifs financiers d’au moins 400 millions de dollars. Environ la moitié de cet argent a été remboursée sous forme d’investissements commerciaux légaux par le biais d’intermédiaires du groupe qui ne font pas officiellement partie de l’organisation elle-même. En échange d’un bénéfice important, les particuliers et les entreprises concernées s’engagent à dépenser un pourcentage important de leur chiffre d’affaires pour remplir les coffres de l’État islamique. L’aspect le plus courant est celui des bureaux de change et des restaurants fast-food qui reçoivent la part du lion des investissements des djihadistes. Bien entendu, cette tactique est connue depuis longtemps par les organisations terroristes qui l’appliquent depuis la guerre froide dans les pays de l’Orient et de l’Occident. Cette activité est déployée depuis 1990 et fait partie du financement de toutes les grandes organisations, y compris le Hezbollah et Al-Qaïda.
La conclusion de ce qu’il est convenu d’appeler des «accords gris» ne se produit pas seulement au Moyen-Orient. Entre 2015 et 2017, une série de rapports des services de sécurité européens montrent que l’État islamique et Al-Qaïda ont considérablement renforcé leurs liens avec la mafia locale et les structures illégales en Europe, les attirant dans leur réseau économique mondial. Alors que l’importation de drogues et d’armes pour l’Europe est une entreprise beaucoup plus complexe et dangereuse qu’au Moyen-Orient, L’État islamique peut, à cette option, représenter un risque proportionnel, et elle l’a fait. L’UE, en particulier les pays frontaliers — l’Italie, la Grèce, la France, l’Espagne et la Bulgarie — doivent renforcer la surveillance de leurs structures criminelles internes et de leurs liens internationaux, afin de minimiser le succès des djihadistes dans ce domaine.
L’UE a exhorté les États membres à surveiller l’implication du Hezbollah sur le continent dans le milieu de la criminalité organisée. « Je regarde la télévision et je lis les nouvelles — je vois les mesures contre l’activité de l’organisation. Je peux vous dire que l’inscription de l’organisation sur une liste de terroristes n’arrêtera pas les canaux d’activité et de trafic — l’organisation est encore plus active en Amérique du Sud et dans les Balkans », affirme un contact du Hezbollah en Bulgarie, qui a aidé l’organisation à établir des réseaux locaux dans les Balkans par le passé. Récemment, la Grande-Bretagne et l’Argentine ont rejoint les États qui ont ajouté la branche militaire du Hezbollah à la liste des groupes terroristes, mais rien n’indique que les membres de l’organisation soient devenus moins efficaces.
Bien que les djihadistes reprennent la majeure partie de la conversation sur la menace terroriste intérieure en Europe, et pour cause, les milices nativistes qui commencent à voir le jour sont un problème qui leur est propre. En juillet 2019, les autorités italiennes ont découvert «une énorme cache d’armes — dont 26 canons, 20 baïonnettes, 306 pièces de canon [comme des silencieux et des lunettes de visée et plus de 800 balles] appartenant à des militants néonazis… Parmi les armes découvertes en la possession des militants d’extrême droite, un missile air-air Matra fabriqué par la France et appartenant aux forces armées du Qatar, soulevant des questions concernant la responsabilité de Doha dans sa manipulation des armes fournies et ses pratiques lors de la vente des armes. Les experts ont tendance à convenir qu’il est peu probable que le Qatar ait fourni directement le missile aux néonazis. Le missile a probablement terminé sur le marché noir où le groupe a réussi à se le procurer. » Quoi qu’il en soit, l’affaire souligne les possibilités qui s’offrent aux groupes disposant de beaucoup d’argent ; les roquettes et même les matières toxiques sont à leur portée.
La possibilité pour les groupes extrémistes locaux en Europe de développer des réseaux de livraison d’armes s’accroît. Une enquête publiée dans Bellingcat, et menée par moi-même et mon collègue Kiril Avramov en mai 2019, a montré qu’il existe certains liens entre les groupes d’extrême droite en Europe occidentale, les nationalistes dans les Balkans et les milices pro-russes en Bulgarie. Ces groupes entretiennent une correspondance active et mènent même des entraînements militaires conjoints. L’un des résultats de cette collaboration est l’acte terroriste à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, où un militant d’extrême droite a tué cinquante personnes dans deux mosquées locales. L’arme utilisée dans l’attaque peut être vue sur les vidéos promotionnelles du groupe nationaliste bulgare BNO Shipka. En utilisant des AR-15, également produits en Bulgarie, l’entraînement militaire se déroule dans la montagne de Strandzha, à la frontière entre la Bulgarie et la Turquie. Tout cela dénote d’une grande activité et d’un réseau beaucoup plus vaste que les autorités locales ne l’avaient imaginé.
Tout cela indique une tendance sinistre. Aujourd’hui, toute organisation ou tout oligarque disposant de suffisamment d’argent peut se permettre d’acheter des armes, y compris des armes lourdes et des munitions militaires. Cela ne serait pas possible sans l’existence d’alliances internationales entre le crime organisé, les groupes terroristes et les oligarques dans les pays autoritaires. En Amérique du Sud, les cartels utilisaient des sous-marins soviétiques vendus par des truands caucasiens et russes. Al-Qaïda protège le flux de cocaïne du Brésil et de la Colombie vers l’Afrique de l’Ouest. Des groupes balkaniques aident des terroristes à s’installer en Europe occidentale. L’État islamique utilise des gangsters belges pour livrer de l’argent et des armes à ses sympathisants. L’extrême droite italienne est approvisionnée en armes par des réseaux criminels opérant au Moyen-Orient et en Russie à travers l’Europe. Les foules albanaise et serbe tuent leurs rivaux en Suède avec des AK-47 fabriqués dans les Balkans. Les exemples de ce genre de choses sont légion.
Il est difficile de contrer cette menace. Une condition préalable pour les États membres de l’UE est d’améliorer l’échange de données entre leurs services de renseignement afin d’avoir une meilleure visibilité sur les réseaux criminels organisés qui rendent possibles les opérations terroristes. Cependant, la cascade de défis ne fait qu’augmenter avec les progrès technologiques. Les cybercapacités dont disposent les acteurs non étatiques ont été utilisées pour neutraliser le gouvernement et les institutions financières. Les drones achetés sur Internet sont entre les mains de presque tous les cartels et groupes terroristes, ce qui leur donne des capacités de surveillance (et éventuellement d’attaque) qui font défaut à certaines armées. Il est évident que les forces de sécurité et de renseignement de l’UE doivent repenser leurs méthodes de travail pour prévenir cet ensemble de menaces. Pour l’instant, le crime organisé fait preuve de plus d’innovation et d’un horizon plus large, tandis que les experts et les services de renseignement semblent bloqués dans les années 1990.
* L’identité des sources est dissimulée à leur demande.
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